mardi 14 janvier 2014

Est-ce bien l'écriture de Verlaine ? suite, par Jacques Bienvenu

Dans l’article précédent, j’ai posé la question : « Est-ce bien l’écriture de Verlaine ?». Il va de soit qu’il ne s’agit que d’une interrogation et que pour l’instant la prudence est de règle. Je ne veux pas à tout prix  prouver que l’écriture n’est pas de Verlaine. Je m’interroge. Je vais ici prolonger cette réflexion en précisant d’autres éléments. On pourrait se demander s’il existe d’autres manuscrits de Verlaine qui sont écrits, comme celui de La Grâce d’une écriture scripte (toutes les lettres sont détachées) qui s’oppose à l’écriture habituellement cursive de Verlaine. La réponse à cette question est oui. Il existe dans une lettre écrite à Lepelletier du 22 août 1874 une transcription d’une série de poèmes Vieux Coppées exactement de la même écriture. J'observe que cette étrange écriture scripte ne semble  avoir été employée  par Verlaine qu’en prison. Ceci serait à vérifier.

Revenons pour l’instant au manuscrit de La Grâce. On peut voir sur celui-ci, à la deuxième colonne au vers 2, quelque chose de vraiment bizarre et qui n’a pas été signalée à ma connaissance. Je donne le vers :

Et, pour mieux déjouer la malice du dia reste,


Vous avez bien lu : on trouve comme mot à la rime « dia reste » au lieu du mot « diable » évident qui figure dans toutes les transcriptions du poème. Vraiment on a du mal à croire que Verlaine ne mette pas « diable » qui s’impose pour la rime avec « effroyable » dernier mot du vers précédent. Songeons qu’il s’agit d’un poète qui rime depuis son plus jeune âge et que la rime a quelque chose d’automatique chez lui. Cette particularité invraisemblable ne pourrait-elle pas s’expliquer si l’on avait affaire à un mauvais copiste ? D’autant plus que le mot  «  reste » se trouve à la rime trois vers plus loin. D’autres exemples de bizarreries seraient à donner en ce sens en considérant les autres feuillets du manuscrit de ce poème. En somme, la question est de savoir si quelqu’un  aurait pu jouer en prison le rôle de copiste pour Verlaine. Il se trouve que dans ses souvenirs de prison Verlaine raconte qu’il donnait des leçons de français à un gardien qui voulait s’instruire. Le poète précise qu’il lui dictait des textes .On voit donc qu’il n’est peut-être pas absurde de penser qu’un copiste ait pu exister à la prison où Verlaine était enfermé. Ce n’est évidemment qu’une hypothèse. Je conclus en donnant ces éléments. Il s’agit d’une recherche en cours qu’un blog permet de donner. Je maintiens qu’il faut être prudent. Des éléments nouveaux peuvent intervenir et peuvent faire basculer l’hypothèse dans un sens ou dans l’autre. Quoi qu’il en soit les singularités de ce manuscrit du poème La Grâce me paraissent utiles d’être signalées.

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